samedi 23 mars 2013

Nouvelles mesures techniques de la Bourse : les professionnels partagés

Les dispositions adoptées devraient améliorer la liquidité de 25% au plus. L’effet pourrait s’essouffler rapidement si les réformes de fond ne sont pas lancées. Les opérateurs évoquent l’importance de développer le nombre de sociétés cotées, d’activer les opérations de prêt de titres, le marché à terme…
mesures techniques de la Bourse
La Bourse de Casablanca vient d’adopter, en concertation avec l’Association professionnelle des sociétés de bourse (APSB), plusieurs mesures techniques dans le but d’améliorer la liquidité du marché. Il s’agit du relèvement du seuil maximal de variation des cours, de l’allongement des séances de cotation, de la réduction des «pas de cotation» et de la durée de réservation d’un titre, de l’augmentation de la quantité minimale dévoilée des ordres de bourse «Iceberg» et enfin de l’introduction, en mars, des ordres à déclenchement. Quel impact auraient concrètement ces mesures sur la place ? Sont-elles suffisantes pour relancer le marché ?
En fait, les professionnels sont partagés quant à l’efficacité de ces dispositions. Si certains d’entre eux estiment qu’elles pourront redynamiser la place, d’autres les trouvent insuffisantes pour permettre une véritable reprise. Younes Benjelloun, directeur général de CFG Group, se montre par exemple optimiste. Selon lui, «même si, fondamentalement, ces mesures purement techniques ne vont rien changer à la situation du marché boursier, les investisseurs auront une plus grande marge de manœuvre durant les séances de cotation pour effectuer leurs transactions. Le plus important changement est le relèvement du seuil maximal de variation des cours à 10% au lieu de 6%. Cette mesure devrait engendrer une plus grande volatilité des cours et, du coup, les investisseurs pourraient réaliser des profits plus importants».
Un autre directeur d’une société de bourse déclare, lui, que ces mesures sont certes nécessaires mais pas suffisantes. «Dans un contexte morose marqué par une baisse de plus en plus accrue du niveau des transactions sur le marché, ces dispositions ne devraient qu’avoir un impact positif sur le comportement des investisseurs. Elles constituent un bon signal pour les opérateurs du marché en attendant d’autres réformes plus profondes», estime-t-il.
Il y aura donc, au pire des cas, un certain effet psychologique sur les opérateurs du marché. «La Bourse a donné un signal aux différents acteurs, témoignant de son engagement pour dynamiser les transactions. Cela peut jouer favorablement sur le moral des investisseurs, en perte de confiance, surtout que le gouvernement dans sa Loi de finances actuelle n’a pas adopté des mesures réellement incitatives en faveur du marché boursier», explique ce directeur.
Cela dit, même s’ils sont optimistes, ces opérateurs estiment que l’effet de ces mesures ne sera pas immédiat. «Il faut quand même un temps d’adaptation, que ce soit pour les investisseurs ou les professionnels du marché. Il faudra un minimum de deux mois pour sentir le changement», assure-t-on.
En tout cas, si effet il y a, il ne sera pas d’une grande ampleur. M. Benjelloun précise que «ces mesures n’auront pas une grande portée compte tenu de l’atonie du marché. En revanche, avec la mise en place prochainement du marché à terme et du prêt-emprunt de titres, cela devrait avoir l’effet escompté». Se voulant plus précis, le directeur d’une autre société de bourse estime que la liquidité du marché pourrait s’améliorer dans une fourchette allant de 20% à 25% par rapport au niveau actuel qui, rappelons-le, est en contraction continue depuis 2008.
Un autre professionnel abonde dans le même sens que M. Benjelloun. Selon lui, «il est vrai que le marché accueillera favorablement les mesures prises par la Bourse puisqu’il est attentiste à tout type d’incitations pour revenir sur le marché actions. Mais, l’effet peut s’essouffler rapidement si ces dernières ne sont pas accompagnées  de réformes globales». Les opérateurs contactés citent le développement des introductions en bourse de taille importante, la multiplication des programmes de rachat et des augmentations de capital, la réforme de la fiscalité sur les transactions boursières, l’assouplissement des tickets d’entrée et de sortie, la vente à découvert et l’introduction des produits dérivés.
Par contre, Ghali Kettani, directeur de la salle des marchés de CDG Capital Bourse, porte un avis négatif sur ces mesures. Pour lui, «le marché ne réagira pas à ces dispositions puisqu’il n’en a pas besoin. Elles ne constituent pas des réformes de fond à même de changer le comportement attentiste des investisseurs et de permettre une meilleure visibilité concernant l’évolution du marché boursier. Il existe d’autres aspects plus importants à aborder que d’étendre une séance boursière ou d’élargir les seuils de réservation d’une valeur». Ce responsable évoque l’urgence de développer le nombre de sociétés cotées pour se hisser au moins au même niveau que les Bourses concurrentes à l’instar de la Jordanie, l’Egypte ou les Emirats Arabes Unis. Aussi, «l’introduction des ETF (fonds qui traquent un indice) ou l’instauration de la possibilité du trading sur l’indice pourraient être des solutions intéressantes dont peuvent profiter les institutionnels pour placer l’épargne qui leur est confiée».
Finalement,  qu’ils soient en faveur de ces mesures techniques ou non, tous les professionnels contactés s’accordent sur la nécessité d’adopter d’autres mesures plus profondes pour rétablir la confiance sur le marché, surtout que «75% des personnes physiques ont déserté la place vu le manque d’opportunités de placement», estime M. Kettani.
Ibtissam Benchanna. La Vie éco
www.lavieeco.com

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