J’ai dû me prémunir contre mes propres préjugés
Je suis marocain, arabe et musulman. J’ai grandi au Maroc, j’y ai vécu jusqu’à l’âge de 23 ans avant de le quitter pour la première fois et de découvrir l’Europe. Depuis le 11 Septembre, je suis choqué par la manière dont les médias parlent de nous. Cette image stigmatisante, tronquée, m’insupportait au fil des années. «Les Mécréants» est donc pour moi une sorte de réaction, motivée par une envie de répondre, de proposer un autre point de vue.
Quant à l’intégrisme religieux, il faut rappeler que c’est un fléau dont on est les premiers à payer le prix, et ce, depuis fort longtemps. Il me paraissait donc urgent d’en parler. Certes, la chose est osée, voire risquée dans le cadre d’un premier film, mais je suis de nature à aimer les défis. J’ajouterai que défendre des idées auxquelles on croit profondément s’avère être souvent un puissant moteur pour surmonter les difficultés.
Craigniez-vous, durant le processus de création, de tomber dans le manichéisme cher à Hollywood (Les méchants intégristes contre les gentils humanistes) ? Comment évite-t-on la caricature grossière lorsqu’on aborde ce sujet ?
En ce qui me concerne, et ce, depuis le début de l’écriture, ce qui m’intéresse le plus est le côté humain de chacun des personnages, d’un côté comme de l’autre. À mon sens, le «gentil» et «le méchant» n’existent pas séparément, l’un n’annule pas l’autre, ces aspects cohabitent plutôt dans la même personne. Le vécu de chacun de nous, les circonstances de la vie font surgir davantage l’un ou l’autre de manière ponctuelle ou en tout cas réversible dans le temps.
Pendant l’étape d’écriture, j’ai essayé autant que j’ai pu de me remettre en question, de revoir mes propres préjugés. Le film se positionne contre les préjugés, il me fallait donc me prémunir contre les miens. Les «religieux» ont, certes, des idées préconçues sur nous mais nous leur renvoyons la balle aussi. Il ne faut pas oublier que «Les Mécréants» est un film qui traite avant tout des certitudes. L’extrémisme religieux n’est qu’un exemple parmi d’autres. Sur la page de garde de mon scénario j’avais noté cette magnifique phrase de Nietzsche : «Ce n’est pas le doute qui rend fou, c’est la certitude !»
Quelle est, selon vous, la façon la plus pertinente d’endiguer le fanatisme ?
Je serais prétentieux de penser avoir la solution, ceci n’est pas mon travail, néanmoins, j’ai le sentiment que l’éducation est une arme nécessaire mais pas suffisante. Les conditions de vie et d’autres paramètres sont à étudier de près aussi. Cela dit, je pense que la violence n’est pas la solution, je dirais même qu’elle produit l’effet inverse, il n’y a qu’à voir l’exemple de l’Irak, l’Afghanistan, etc. Il nous faut une réflexion de fond et une vraie remise en question de nos politiques, car il s’agit avant tout d’un fléau qui menace ce qu’on a de plus cher, à savoir nos enfants.
La Vie éco
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